Kemissa Trecile, Une Femme Haïtienne Qui Ose Et Qui Passe à ” l’ATAK “
« Survivre, c’est marquer l’histoire. », tel est le credo d’une femme de 32 ans, originaire de Port-au-Prince. Kemissa Trecile se voit comme une combattante. On ne s’engage pas que pour soi, mais aussi pour toutes ces femmes et ces enfants dont les cris ne sont pas entendus, les droits lésés et qui sont en quête d’une voie meilleure. C’est une obligation morale pour cette Disk Jokey (DJ) qui clame haut et fort : « Je connais mes doigts ». Lisez le profil de Kemissa Trecile pour ce mois de mars marquant le combat des femmes dans le monde.
Parcours et engagement
Réservée, il faut croire que rien n’a prédestiné Kemissa dans son enfance à devenir une DJ qui allait être très connue, sinon les platines qui la fascinaient tout le temps. Ces disques lui ont servi de portes d’entrée dans l’univers merveilleux de la musique qu’elle vit depuis comme une passion, difficile à éteindre. Contre vents et marées, elle se tient. Elle manœuvre entre les attentes du public et les exigences énormes faites aux femmes dans notre société. Elle ne le cache pas d’ailleurs : « Les débuts sont très compliqués lorsqu’on est un avant-gardiste dans un domaine et qu’on veut faire les choses différemment. Voilà ce qui a été en résumé mon plus grand obstacle : Trouver l’équilibre entre mon art et les attentes du public. Cela m’a pris du temps pour y parvenir. Mais je ne changerais ces expériences pour rien au monde car elles m’ont permis de forger ma carrière », avoue-t-elle entre des petits rires fous.
La musique se joint à la pratique du droit pour amener la jeune DJ à cheminer vers une carrière de spécialiste en droit des contrats. Un jumelage très bénéfique pour la carrière de celle qui témoigne aussi un intérêt particulier pour l’environnement, notamment à travers l’Association Jeunesse Verte Haitienne dont elle est membre .Pour le moment, elle travaille à plein temps au Bureau de suivi et de coordination des Accords de la Caricom, de l’Organisation Mondiale du Commerce et de la ZLEA. Elle effectue, entre autres, des consultations en matière de droit commercial.
Par ailleurs, elle s’engage dans la protection des droits de la femme et la défense des droits de l’enfant et s’implique dans plusieurs fondations à caractère philanthropique. En ce sens, « Attention ! Je connais mes doigts », est une campagne lancée en 2019 « pour choquer et capter mon auditoire sur des sujets importants », confie celle qui se dit fière du chemin que cette campagne de sensibilisation a parcouru tant dans les écoles, les universités et sur plusieurs autres plateformes. L’avenir de cette campagne se dessine en une organisation à but non lucratif qui permettra à d’autres femmes d’élever leur voix pour la cause. En 2020, il y a eu « W.È.M » Women Empowerment Movement. Cette année, suivez-la sur les réseaux sociaux. Kemissa Trecile est aussi une femme d’affaires pleine d’ambitions. Elle a monté son entreprise « Au Top Kemissa » qui se spécialise dans l’organisation d’événements et spectacles. Elle dit déjà vouloir élargir dans un futur proche les dimensions de son entreprise.
Vue sur Haïti
D’abord une question directe. Êtes-vous féministe ? « Je suis féministe et je n’ai pas peur de le dire », répondit-elle tout de go et poursuit pour dire que « souvent, on essaie de catégoriser le féminisme à un courant de pensées ou une manière d’être mais moi, je défends la cause de la femme tout simplement et en restant authentique à ma personnalité. Tant que nous faisons face au patriarcat, au sexisme et au machisme je serai féministe. ». Entre combats et illusions, malheureusement, la réalité haïtienne est des plus tristes. « J’arrive à un carrefour où je devrais pouvoir apporter un changement au pays et je constate que je suis impuissante face à une situation qui ne s’améliore pas. Mais la difficulté ne rime pas avec l’impossible. Dans les 3 choix qui s’offrent aux jeunes aujourd’hui, j’ai choisi de rester et j’ai le devoir de combattre, de m’impliquer dans la vie de la cité ». Un choix patriotique d’une citoyenne responsable, le moins qu’on puisse dire.
Kemissa, une amoureuse de la vie
Entre petites sorties, musique et travail, la fille qui a hérité de son père la discipline et de sa mère l’amour a une vie amusante. Le sport est sa troisième passion. Quelques heures passées en salle de sport ou sur un terrain de basket lui permettent de se libérer l’esprit, rester en bonne santé et booster sa créativité. Elle nous gratifie d’une exclusivité, un nouveau sport. « Je suis tombée sous le charme de la boxe », nous confie-t-elle.
Nous sommes nombreux à être tentés par des séries sur Netflix. Un sentiment partagé par la mordue du Cinéma. Après des soirées passées à regarder des séries ou des films, on peut surprendre Kemissa à commenter les derniers épisodes de ses séries préférées : « The crown », « Power » ou donner un avis sur le dernier film de Gina Prince-Bythewood, « The Old guard ». « Cela m’amuse de faire des commentaires en direct sur les réseaux sociaux et d’interagir avec l’audience. Les salles de ciné me manquent gravement », regrette la star qui ne lit pas avec le même engouement qu’autrefois, néanmoins salue l’effort immense de certains auteurs haïtiens qui ont su traiter des thèmes liés à la politique, l’économie, le social.
Qui serait Kemissa Trecile dans une autre vie ? Elle croit qu’elle aurait été la jumelle de Kemissa, aurait fait deux fois plus d’actions dans la société et porté deux fois plus de chapeaux avec elle. Elle en a déjà plusieurs, mais pas assez. La célibataire encourage les jeunes filles à être consciente de leurs situations, à s’engager de très tôt et défendre leurs droits. « Vous vivez dans un monde patriarcal, alors prenez de l’avance sur ce fait en mettant toutes les chances de votre côté afin que votre circonstance ne définisse pas votre vie. Ne vous donnez pas de limites dans la société et impliquez-vous. Entourez-vous d’une équipe gagnante. ». On attend encore de belles choses de cette étoile montante qui compte sur le soutien infaillible de ses fans.