Gouvernance Et Les Gouvernés
Que deviendrait notre monde s’il n’y avait pas la gouvernance capable d’assurer la mise en œuvre d’un ensemble de dispositifs pour garantir une meilleure coordination et faciliter la prise de décision consensuelle? Ce serait sans nul doute le chaos, l’anarchie totale. En effet, elle est indispensable à toutes formes de sociétés. Cependant, bien qu’elle soit présente, cela n’empêche que les acteurs concernés n’en fassent une utilisation négative. De plus, la population, à force de ne voir que le résultat d’une mauvaise gouvernance finit par ne plus savoir comment elle devrait être.
C’est dans cette optique que le Centre pour la Promotion de la Démocratie et de l’Éducation Participative (CPDEP) en partenariat avec le Centre d’Animation et de Développement Intégré (CADI), par le biais de son groupe THINK TANK, organisa au centre T-Nes les jeudi 30 et vendredi 31 août 2018, dans l’arrondissement de la Croix-des-Bouquets, le premier colloque sur la gouvernance pour traiter du thème « La gouvernance au service du développement ». L’objectif poursuivi a été de conscientiser la population sur les défis majeurs auxquels nous faisons face aujourd’hui tant au niveau national qu’international en matière de développement durable.
Après que les représentants des structures CPDEP et CADI aient présenté ces derniers, respectivement Benzico Pierre et Jean Alcide Annylusse, la première journée a été comblée par deux sujets. La première intervention a porté sur « La contrebande de la République Dominicaine vers Haïti, chaos ou opportunités? ». Ce sujet à piqué la curiosité de plus d’un, sachant que notre pays est victime d’un taux élevé de contrebande. Benzico Pierre, économiste, n’a pas manqué de satisfaire leur curiosité. Il a exposé le contexte socio-économique de cette activité illégale et a mis l’accent sur la violence, les grèves, les instabilités politiques et le contrôle de l’État par une cellule, tous des cailloux qu’a semés la contrebande sur son passage histoire de bien laisser ses traces.
La seconde intervention a fait l’objet des « Télécommunications au service du développement ». Ce n’est un secret pour personne qu’au niveau international la vitesse 5G court les rues alors que chez nous en Haïti, la 3G pavane à dos d’âne. Cependant, selon Bernatho Colas qui avait pris en charge ce sujet, cela ne signifie pas que nous ne n’avançons pas. Si aujourd’hui la tentative d’établir la vitesse 4G LTE a échoué c’est parce que l’état Haïtien n’a accordé de licence à aucune des compagnies de téléphonie mobile à savoir la Digicel et la Natcom. Au contraire, ces derniers sont considérables. Le public ne cacha pas son ébahissement lorsqu’il leur dévoila quelques secrets des télécommunications tout en montrant les bons et mauvais côtés. Suite aux questions auxquelles les intervenants ont répondu sans peine, le public s’en alla réjoui et déjà impatient du lendemain.
La journée du 31 août, quant à elle n’a fait l’objet que d’un sujet : « Pourquoi changer la constitution? » En effet, il y a tant de chose à dire, tant de cartes à jeter sur la table qu’il serait presqu’impossible d’en débattre en quelques minutes. Sachant que c’est un sujet d’intérêt général, il a bien fallu y consacrer une journée. Encore une fois, le public a été au rendez-vous. D’abord, Bernatho Colas pris le micro afin d’expliquer au public les différentes actions que pose le CPDEP, la mise en œuvre du Programme d’Appui à la Gouvernance (PAG) entre autre dont la finalité est de réaliser certains projets. Les principaux bénéficiaires sont les partis politiques, les parlementaires, le secteur privé, la société civile et les élus. Jean Alcide Annylusse à son tour exposa les différents thèmes qui tiennent à cœur le CADI et la manière dont il s’y prend pour permettre aux bénéficiaires d’être les principaux acteurs des projets qui leur sont dédiés.
Peu après, on passa au plat de résistance. Thony Saint-Il, sociologue-anthropologue, a ouvert le débat sur le sujet tant attendu. Il a fait part au public des tares qui rongent notre gouvernement et qui empêchent au pays de fonctionner selon « les normes ». En ce qui concerne la constitution, différents acteurs entrent en scène à chaque situation donnée explique-t-il. Pour être reformé ou amendé, il incombe au législatif et à l’exécutif de prendre la constitution en charge. Cependant, il est de la responsabilité de la population en générale de permettre qu’elle change. Saint-Il a pris des exemples concrets afin de démontrer le mauvais fonctionnement du gouvernement qui souvent est le principal responsable de l’ouverture de la vanne de la corruption. Haïti est en pleine transition depuis 31 ans et rien n’est fait.
Le public, conscient de la situation acquiesça, commenta et alimenta la discussion. Après analyses, il se rendit compte que c’est la charpente de la constitution elle-même qui constitue une contrainte aux programmes de développement. La journée s’est achevée sur une invitation de Thony Saint-Il à signer une pétition pour le changement drastique de la constitution. Invitation qui bien sûr, n’a pas été refusée.
La Croix-des-Bouquets n’a été qu’une cible mais d’autres colloques se feront dans d’autres villes du pays en espérant que tout le savoir acquis par les bénéficiaires sera transmis à d’autres car nous sommes convaincus qu’un jour, le glas du changement se fera entendre de tous et qu’à ce moment, Haïti sera sur les rails du développement.