Gabrielle Aurel, La Vie d’Une Femme Dédiée à Son Pays
Entrepreneure sociale, Fondatrice et présidente de Sonje Ayiti Organization, Co-fondatrice et secrétaire exécutive de Société Agricole de Production et d’Élevage du Nord (SAPEN.SA), Gabrielle Aurel est l’une de ces héroïnes agissant dans l’ombre dont les œuvres aussi cachées soient elles, sont d’une portée significative pour le pays. Originaire de la ville du Cap, cette quadragénaire mais toujours aussi bourrée d’énergie, est issue d’une famille modeste et a pu gravir les échelons au fil des années. Toutefois, elle n’a pas manqué de drainer dans son sillage d’autres personnes en situation de vulnérabilité.
Un Parcours difficile
Très jeune elle dû grandir sans ses parents et a passé une bonne partie de sa jeunesse en pension avec son petit frère. Son père avait laissé Haïti, parti en quête d’une vie meilleure chez l’oncle Sam, et sa mère allait perdre la vie dans un naufrage trois ans plus tard. Cette dernière essayait de rejoindre son mari aux Etats-Unis illégalement mais ne fut jamais arrivée à destination.
Gabrielle Aurel parle de son enfance comme étant une expérience douloureuse où elle dû grandir plus vite qu’elle ne devrait pour essayer de survivre. Croyant déjà en sa force de travail, elle savait qu’elle ne pouvait compter que sur elle-même. Elle était aidée par son père certes, mais quand celui-ci tombait malade ou en difficulté financière, lui-même, elle devait se débrouiller seule. Ainsi, très jeune, elle débute difficilement un petit commerce de vente de nourriture avec son petit frère. Par chance, ce dernier ne tardera pas à rejoindre le paternel aux Etats-Unis, chose qu’elle fit à son tour une fois les études classiques bouclées.
Laisser le pays a marqué un tournant considérable dans sa vie. Elle est allée à l’université, puis a travaillé pendant cinq années comme statisticienne dans l’Etat de Géorgie, s’est mariée et a eu deux enfants. Cependant, elle a quitté Haïti mais Haïti ne l’a jamais quittée. D’où ses fréquentes visites lors des vacances d’été.
Retour au pays et Engagement
Ses brefs retours au pays ne lui ont pas laissée indifférentes. Elle avait ce sentiment du devoir mais ignorait par où commencer. Alors, en pleine crise politique et catastrophe naturelle, entre 2004 et 2005 elle fonde Sonje Ayiti pour inciter la diaspora à aider les haïtiens. Toutefois, elle savait qu’elle devait se rendre sur place. « Pour faire un travail de positif et d’utile, il faut se rendre disponible » dit-elle. Elle ne voulait pas être l’une de ces personnes issues de la diaspora qui envoient de l’argent en Haïti sans créer un réel impact.
Ainsi, après quinze années à Atlanta, Gabrielle Aurel a prit la décision de revenir définitivement en Haïti, en 2006. « Le même Dieu qui me bénit aux Etats-Unis, est aussi en Haïti » affirme-t-elle. Son combat depuis consiste à construire le « rêve haïtien ». Elle aide les gens à s’aider eux-mêmes, à mettre leurs capacités à profit, leur redonner confiance en eux, à croire au fait que les mauvaises situations de la vie ne doivent pas être permanentes.
Aujourd’hui, à travers Sonje Ayiti elle permet à plusieurs personnes de changer de vie grâce au projet Chimen Lavi Miyò (CLM) où celles-ci se forment à devenir autonome. L’organisation a fondé une école communautaire en plein cœur de Cima à Limonade, permettant à plusieurs centaines d’enfants d’être scolarisés. Elle co-dirige aussi, depuis plus d’un an, le Projet Klere Timoun avec l’Organisation Entre Les Pages pour outiller les enfants à s’autonomiser dans la vie dès leurs plus jeunes âges. Il y a encore la société à but lucratif (Société Agricole de Production et d’Élevage du Nord, (SAPEN, SA)) en 2010, qui est une entreprise d’élevage de poulet, dans le souci de démocratiser la nourriture en Haïti.
Ecole communautaire à Limonde
Un retour difficile mais nécessaire
Elle avoue ne pas subir le poids du machisme et du sexisme durant son parcours, peut être grâce à son caractère fort et sa foi inébranlable en ses capacités. S’identifiant comme une humaniste, elle se dit prête à travailler avec toute personne désireuse d’avancer peu importe son sexe. Sa plus grande satisfaction dit-elle, c’est de voir une personne qu’elle a aidé par le passé qui réussit dans la vie. Il y a, entre autres, des jeunes à qui elle a payé les études qui travaillent avec elle aujourd’hui au sein de l’Organisation ou encore certains enfants de l’école de Cima qui commencent déjà à faire leur preuve.
Pour Gabrielle Aurel, seule une révolution mentale, un fort investissement dans l’humain et un nouveau leadership peuvent endiguer ce pays dans ce marasme socio-économique. D’où son message à la jeunesse d’aujourd’hui : « Essayez de trouver quelque chose qui vous passionne pour changer votre environnement, vivez vos rêves et inspirez d’autres gens. Prenez des risques, contribuez au développement du pays assumez la responsabilité de vos vies et surtout, n’ayez pas peur de perdre des amis en chemin. »
Quoiqu’elle travaille quasiment tout le temps, Gabrielle trouve un peu de temps pour se distraire, aller à la plage, mater des films africains ou des documentaires, faire un peu de lecture mais aussi discuter de politique à l’occasion. Elle aime sa vie comme elle est, elle adore son travail mais elle pense qu’elle pourrait tout aussi bien être une agronome ou une avocate dans une autre vie.