Musique: Torture Ou Outil De Conscience Collective?

Torture ou Outil de Conscience Collective?

Rythme. Son. Mélodie. Silence. Harmonie.

C’est un phénomène universel qui traverse le temps et l’espace. Où que nous soyons dans le monde, sans même en comprendre l’essence, sans connaitre la langue utilisée, nous saurons reconnaitre la musique. Elle se fait remarquer partout où elle est présente

Il y a ce courant qui traverse l’air lorsqu’une musique est jouée. Selon le rythme et la mélodie, il y a parfois cette paix qu’elle nous fait ressentir au plus profond de nous-même, qui nous plonge presque dans une sorte d’hypnose, où notre esprit est libre comme le vent et notre corps, détendu. D’autres fois, il y a au contraire, cette décharge électrique qui parcourt notre être, nous met dans une excitation pas croyable. Une frénésie, mais tellement agréable. Contradictoire? Je le sais. Mais ceux qui sont adeptes de musique Compas, de Zouk, de RnB savent bien de quoi dont il est question. Mais au-delà de ses vertus apaisantes, c’est l’activité musicale en tant que telle qui ne cesse de susciter des questions de nature éthique.

La musique est une source. Elle fait partie intégrante de la culture d’un pays. Ce dernier peut s’identifier à  elle. C’est un canal à travers lequel des idéologies sont transmises. En Haïti, c’est le Compas notre empreinte musicale. Popularisé en 1955 par le musicien Nemours Jean-Baptiste, il se caractérise par la rapidité de son rythme. Par son style, la gaité qui le traverse, il a même influencé la musique Cubaine par le grand nombre d’Haïtiens qui y vivaient vers la fin du XXe siècle.

La musique, dit-on, adoucit les mœurs, cependant, depuis quelques années, une autre forme de musique a pris corps sur le territoire national. Très apprécié des jeunes, le Rabòday court les rues. Il puise ses ressources dans le rara traditionnel, mais demeure tout de même diffèrent. On ne pourrait affirmer que le contenu de cette musique populaire soit ce qu’il y a de plus sain pour notre santé psychologique. En effet, si dans le Compas, les chanteurs nous font connaitre le fond de leur pensée, leur vécu, relèvent notre conscience citoyenne, incitent aux changements, à l’avancement de notre société, nous racontent des histoires d’amour dans lesquelles souvent nous nous retrouvons, le Rabòday quant à lui, fait véhiculer des messages de dénigrement – principalement de la femme – des messages faisant référence à la prostitution, la violence, la vengeance. C’est le genre de musique sans authenticité aucune, sans souplesse, qui opèrent chez les jeunes un lavage de cerveau. Nous parlons là de torture psychologique.

La musique, c’est un patrimoine. La conservation du patrimoine musical est sans doute le point le plus délicat des cultures traditionnelles. Mais de quel patrimoine parle-t-on lorsque ce dernier incite à la débauche? Au contraire n’est-elle pas censée être le canal à travers lequel les jeunes prennent conscience de l’effort qu’ils doivent consentir pour réussir dans la vie? Ne doit-elle pas être celle qui leur fait prendre conscience de leur responsabilité vis-à-vis de leur pays? Celle qui les pousse à aimer ce dernier davantage? C’est à cela que doit servir la musique. Toutes nos valeurs intrinsèques peuvent y être transmises.

C’est aussi un moyen de détente et favorise la construction d’un lien social. Elle est source d’épanouissement et de confiance en soi. Nous sommes tous d’accord. Mais il faut bien se demander comment une jeune fille peut avoir confiance en elle si dans les musiques qu’elle écoute tous les jours on lui fait comprendre qu’elle n’est rien qu’un bout de chair destiné au plaisir. Quel détente y a-t-il à cela? A quoi est voué le futur du pays si sa jeunesse est en mode chute libre? Il y a encore une chance pour qu’Haïti soit de nouveau sur les rails et la musique peut y jouer un important rôle. Ce n’est pas le Rabòday en soi le problème, mais les messages véhiculés.

Il n’est pas nécessaire que ce soit à travers des paroles négatives, dénigrantes et vides de sens que nous les jeunes, nous amusions.  Sachons tirer du bon là où il y en a à tirer. Entourons-nous d’énergies positives. C’est de cela dont nous avons besoin pour progresser!